vendredi 27 avril 2012

VIELSALM DE MON ENFANCE (4)


(Le n°1 est paru le 9 mars, le n°2 le 23 mars et le n°3 le 6 avril)

Juste au-dessus de cette propriété Sépult qui va faire place à la nouvelle pharmacie Delcominette, voici la Pâtisserie Royale d’Alfred Dubru. Celui-ci avait racheté ce commerce à Ernest Tellin qui avait épousé une sœur de mon papa, mariage à la ferme des Concessions comme on savait les faire en ce temps-là avec toute la flopée des cousins, petits cousins et arrière petits cousins. Mais des problèmes de dos lui avaient imposé d’abandonner cette activité. Alfred Dubru était parfois aidé par Alexis Archambeau, un homme grand, mince et droit comme un i. Tout en haut de la place on trouvait l’officine à façade en bois vert existant toujours actuellement du pharmacien Delcominette qui avait succédé à son collègue Moxhet disparu pendant la guerre.


En face, on trouvait de bas en haut : la bijouterie de Madame et Mademoiselle Starck, un café tenu à l’époque par je ne sais qui, ensuite notamment par Marie Richter, chez Mersch dont la fille Denise a un problème dans une jambe, ce qui ne l’empêche pas de traverser toute la localité une fois par semaine, le vendredi je crois, pour chercher du lait chez nous, chez Fraipont-Andrianne, chaussures puis chez Dodoche Demoulin : appareils électro-ménagers et studio-photo. C’est là que j’ai été photographié nu sur une peau de mouton : c’était encore la mode. (Photo sur simple demande)

Le gros bâtiment de l’École Saint-Joseph dominait – et domine encore – la place. Donnant dans la cour, il y a le corps de logis des parents de Monsieur le Vicaire. Je suis entré pour la première fois dans ce bâtiment lorsque nous avons commencé le catéchisme pour la « grande communion ». J’avais été étonné de voir l’état des locaux : murs pelés, couleurs disparues… Et nous, les « communaux » étions regardés sans aménité par l’instituteur Monsieur Monfort.





Par la ruelle à droite de cette école nous allions à la messe dans le baraquement installé dans l’actuelle cour supérieure de récréation de l’École Saint-Joseph pour pallier l’absence d’église depuis la guerre. Un film tourné en 1950 montre la sortie de la messe dominicale : on en mettait du monde dans cet édifice provisoire et toute la population, semble-t-il, assistait à l’office. En face de ce baraquement, la boulangerie Masson ne m’a laissé aucun souvenir si ce n’est celui de la voiture hippomobile de livraison du pain qui pourrira là de nombreuses années. Au bout de la Cour Georges, nous allions parfois avec ma maman chez une dame qui remaillait les bas nylon. Autre exemple d’une activité disparue ! Nous faisions le tour par le petit sentier interdit à toute circulation autre que celle des brouettes pour revenir sur la place en passant dans l’étroit passage entre la maison Lenoir et l’École Saint-Joseph.










Poursuivons vers Sous-Bois : le cordonnier Remacle et Jean Gustin, taxi avec un minibus DKW, assurances et électro-ménager occupent deux maisons jumelles ; ensuite le café Léonard (Chez Léon Caca) puis l’Hôtel Archambeau qui vient de récupérer l’appellation Belle-Vue . Rien à voir avec l’ancien Hôtel Belle-Vue propriété de Léontine Thonard-Jeunejean, une tante de ma maman. L’immeuble (emplacement actuel du parking sous l’église) avait été détruit par incendie avant la guerre. Les dépendances étaient restées plus ou moins intactes car Joseph Choffray y stockait ses pommes de terre. Assez curieusement, les imposants travaux de construction de la nouvelle église n’ont laissé pratiquement aucune trace dans mes souvenirs, sinon sur leur fin ! En face, la grosse maison Mouton ( Le Contes de Salme actuellement) surplombe le dépôt des matériaux de construction de Mathieu Blanjean qui profite de la voie ferrée ( tronçon subsistant de la ligne Vielsalm-Born) qui au-delà du passage à niveau non gardé permet l’évacuation des bois découpés sur le chantier installé là ( Magasin Spar et ateliers communaux actuels).

Dans les maisons en contrebas de la grand route habite notamment notre facteur Jules Damoiseau, vieux célibataire bourru, puis nous voici chez Joseph Choffray, autre cousin de mon papa, et son commerce de fourrages, grains et charbons. Avec un de ses camions, il vient souvent rentrer le foin fané par mes parents.

En face, au pied de la côte vers Priesmont, la villa des Roches, chez Kieffer. La « Colonelle Vandervelde » et sa sœur Marie y règnent en maîtres. Deux personnages hauts en couleurs et en bagoût qui feraient à elles seules l’objet d’un article séparé !

Sur la grand route de Grand-Halleux, après l’ancienne maison Offergeld, Charles Deboutemont vient de construire le nouveau garage Auto-Stop : concession Peugeot et pompes à essence. Puis après deux ou trois maisons, la magnifique propriété de chez Courard entretenue avec un soin méticuleux : pelouse rase, le gravier des allées parfaitement ratissé, toutes les plantes et haies taillées au millimètre. Et puis nous voici à la scierie des frères Jules et Norbert Grognard : grosse activité à l’époque avec de nombreux camions. Les enfants Jean-Louis, Paul, leur sœur plus âgée, Michel et Pierre viennent à l’école communale. En face, pour mémoire, le château de Golonfa, un peu mystérieux, où habite un peintre Demarteau et à côté la grotte N.D. de Lourdes souvent fréquentée par des processions.

Robert NIZET

samedi 21 avril 2012

Les ceux de chez nous L’HOMME-OISEAU


Il vous est à coup sûr arrivé lors des belles soirées d’été d’avoir votre attention attirée par un bruit de moteur dans les airs : vous levez les yeux et vous voyez apparaître une grande voile de couleur à laquelle est suspendu un homme avec une hélice dans le dos. Quel bonheur pensez-vous de se mouvoir tout là-haut en toute liberté et d’admirer le paysage comme le font les oiseaux. Quelle témérité aussi de voyager ainsi suspendu à un mouchoir de poche ! Bienheureux en tout cas ce pratiquant du paramoteur, en l’occurrence Jean-François Jacob, à moins qu’il ne s’agisse de John Mathen ou de Philippe Choque ou d’un autre venu de Manhay : ils sont parfois deux ou trois à organiser un ballet aérien.



Jean-François Jacob fait partie de cette famille Jacob solidement ancrée à Rogery depuis des siècles, est marié, a un enfant et est le directeur du Centre fermé de Vottem. En cette qualité, il doit notamment recevoir les médias qui s’intéressent à cette institution et a donc rédigé sur celle-ci une quantité d’articles et de rapports pour préparer la tâche des journalistes. Depuis 9 ans maintenant il est un adepte des ultra-légers motorisés puisqu’il a piloté des U.L.M. à différents endroits mais s’est spécialisé depuis dans le PARAMOTEUR, plus léger encore que l’ultra-léger. Son équipement complet pèse en effet de 25 à 30kg et comprend un petit siège, un moteur de 175 cm3 et 25CV, l’hélice et la voile spécifique faite de deux couches et de 20 caissons d’une surface de 30 m2 . Le coût d’un tel équipement est semblable à celui d’une moto de route avec les équipements. Ici, en fait d’équipement, il faut ajouter un casque et une radio pour converser soit avec l’épouse restant à la maison, soit avec ceux avec qui on vole. Au point de vue effort physique, ce sont les jambes qui fournissent l’effort principal au décollage : il faut en effet courir avec tout l’équipement de +/-30 kg sur le dos. Pour le reste ce sont les bras tendus vers le haut qui interviennent pour commander la voile. Contrairement à un U.L.M. qui a besoin de certaines installations, le décollage se fait n’importe où en tenant compte de l’orientation du vent dont la vitesse ne peut excéder 25km/h et sans rafales, principalement le matin ou le soir, comme pour les montgolfières. Certains disposent d’un appareil sur chariot mais le décollage ne peut alors se faire dans les hautes herbes ou sur terrain irrégulier et le tout est évidemment plus encombrant et plus cher. La vitesse peut atteindre les 60 km/h et l’autonomie est de 2 à 3,5 heures. Ainsi, il arrive à Jean-François d’aller rendre visite à un ami à Saint-Hubert près de chez qui il atterrit. Après le repas pris avec celui-ci, redécollage et retour vers Rogery ! Jean-François Jacob possède son brevet de pilote, théorique et pratique, mais ce n’est pas obligatoire pour voler en paramoteur. Il y a un règlement à respecter (zones interdites ou contrôlées comme les domaines militaires ou les aéroports), une altitude maximale de 800 m au-dessus du niveau de la mer donc +/- 350 m dans la région, pas d’autorisation ni d’immatriculation pour l’instant mais ça ne saurait tarder. Pour son usage personnel il tient un carnet de vol : actuellement il compte plus de 450 heures de vol avec l’U.L.M. et le parachutisme qu’il a pratiqué auparavant. Quelques petits pépins ont émaillé ses 9 années de vol, un peu de casse aussi pour avoir mal évalué la vitesse, mais vraiment rien de grave. Il a toutefois été dernièrement et à son corps défendant l’objet de la sollicitude des services de secours. Revenant du Grand-Duché vers 21 h, il volait en rase-mottes en remontant vers Beho, s’élevant pour franchir une zone boisée puis redescendant très bas tout de suite après celle-ci. Un automobiliste l’ayant vu faire cette manœuvre a imaginé que c’était un parachutiste qui se crashait et a alerté police et pompiers qui ont fouillé toute la zone, en vain évidemment. Un hélicoptère fut même dépêché depuis Melsbroek. Après plusieurs heures de recherche, un pompier eut l’idée de téléphoner à Jean-François et après plusieurs échanges d’informations, les services de secours se rendirent compte de leur bévue ! Ajoutons encore que Jean-François vole parfois derrière les oiseaux : les grues sont trop rapides pour lui mais les milans conviennent bien à un vol de concert. Un peu à l’image du magnifique film L’envolée sauvage.

Robert NIZET

mercredi 18 avril 2012

VIELSALM DE MON ENFANCE (3)

( Le n° 1 a été publié dans L’Annonce de Vielsalm du 9 mars et le n°2 dans celle du 23 mars dernier)

{Rue du Vieux Marché, numéros actuels des maisons dans ( )}

Dans les dépendances de la grosse maison Offergeld, on fabrique des pierres à rasoir. A ce moment, je sais tout juste ce que c’est et je suis évidemment bien loin d’imaginer qu’un jour je participerai activement à la création d’un musée du coticule. On voit repasser à vélo devant chez nous chaque soir des gens de Salmchâteau — dont une dame affectée d’une énorme tache de vin — occupés à cette activité si particulière.



Quelques maisons dont celle des frères et sœur Guillaume (62) pour ainsi dire inchangée sauf les volets baissés et celle de l’entrepreneur Clément Englebert (56) que je vois avec une espèce de lévrier et puis celle du dentiste Maurice Delaval (54). Quand on va se faire soigner les dents, on reçoit une figurine en plastique. Et puis voici la grosse propriété Lechat (Place de Salm) magnifique immeuble bordé d’un parc arboré d’un côté et de l’autre d’une longue et basse construction, anciennement entrepôt du tanneur Beaupain mais, à mon époque, affecté, je crois, à la société d’électricité ESMA.

Au-delà voici le café Dupré (44) et plus loin chez les demoiselles Masson (32) La maison des vins de France , alimentation, vins et spiritueux, le magasin d’électro-ménagers de Nicolas Kartheuser (30), l’épicerie-poissonnerie d’Albert Kopp (26) où l’on trouvait aussi des graines pour oiseaux. Un peu plus loin le studio photographique Gillet (18) dont je me demande si je l’ai réellement vu en activité. Et puis la boulangerie Debra (14 ou 12 ?) le patron, la pipe en bouche, portant le pain à domicile dans sa Juvaquatre camionnette noire, l’horloger-bijoutier-opticien Bechet (10) dont nous croisons tous les jours en allant à l’école l’épouse qui va enseigner au Pensionnat. Et puis, débordant sur le trottoir jusqu’à le supprimer complètement la pension de famille Hoffman ( 8 ). Par les fenêtres toutes proches de la rue on voit la grande table préparée pour accueillir les nombreux pensionnaires. Dans une annexe en briques, plus récente, Maurice Hoffman vend et répare des vélos. Tout à côté, en retrait et en léger contrebas une petite maison où officie un tailleur.

L’ancien Hôtel des Ardennes (4), un temps auberge de jeunesse, ne m’a laissé aucun souvenir au contraire du petit magasin d’Agnès Botte qui était en réalité une Thomas : son immense comptoir, sa forte claudication, sa bonne humeur perpétuelle. Entre ces deux derniers, une magnifique petite maison très ancienne, chez Willem (2), autre joyau - avec la maison Hoffman - disparu.



La famille Demoulin occupe le bas de la place : la boucherie, la boulangerie et le magasin de vêtements pour enfants Au Petit Poucet d’Annette épouse Bechet. Et nous voici au presbytère occupé par le Doyen Léon Pierrard. Celui-ci a un vilain penchant pour le Bols. N’empêche, lui et son jeune vicaire Georges Léonard, ça c’étaient des curés !



Retour au devant de la rue. Dans le groupe de maisons il y a, je pense, un légumier (Stréber ?) et un marchand de chaussures (Georis ?) puis un stock américain tenu par Guy Lassine et qui sera détruit par un incendie. Tout le reste de la rue est bordé par le mur de la propriété du notaire Lambert et celui de chez Sépult. Le premier à bâtir là sera Edgard Hoffman en même temps qu’il était contremaître aux travaux de construction de la nouvelle église. Les mauvaises langues (si, si, ça existe !) racontent que tous les camions de pierres n’allaient pas jusqu’à l’église. Effectivement, je le sais puisque nous avons acheté cette maison en 1986, les pierres d’arkose sont les mêmes que celles de l’église et les appuis de fenêtre du grenier sont faits de déchets de marbre dont l’origine ne fait aucun doute. Bientôt viendront s’ajouter des constructions, surtout des commerces, mais dans quel ordre chronologique, je ne peux le dire. Au bout de la rue, le trottoir est constitué par le banc ardoisier qui affleure : on marche sur le rocher à un endroit où la grosse maison Sépult est si proche de la maison Hoffman que deux voitures peuvent à peine s’y croiser. Pas étonnant que le terminus du tram de Lierneux avait dû être avancé d’environ 200 mètres. Cette grosse maison Sépult avec ses nombreuses fenêtres et ses volets de tôle était déjà abandonnée au moment que je décris. Certains à l’école ou au catéchisme racontaient qu’ils allaient en expédition dans ses nombreuses pièces. Je regrette bien de ne pas avoir pu les accompagner !

A SUIVRE / Robert NIZET

VIELSALM DE MON ENFANCE (3) – COMPLÉMENT

Mes appels pour obtenir quelques informations complémentaires à mes souvenirs trop souvent parcellaires, incomplets ou déficients ont enfin eu un écho. Merci à Jean-Pierre van Campenhout pour les précisions suivantes apportées à la description de l’actuelle rue du Vieux Marché.

La première maison, actuellement chez Yvon et Jeanne Meurice, était celle du géomètre Clermont et de son épouse née Dupré. Venaient ensuite le salon de coiffure d’Albert Lanuit, le stock américain de Guy Lassine, les chaussures de Léonard Georis qui avait une fille Denise, le légumier Albert Stréber et la maison d’habitation de la famille Sonveau (actuellement Banque du Crédit agricole).

Un peu plus loin que chez Albert Kopp, dixit toujours J.P. van Campenhout, il y avait un poissonnier Bruyère qui avait un fils Thierry ( dont on se moquait à l’école parce qu’il sentait le poisson !) et une fille Chantal. Il fallait monter deux ou trois escaliers pour entrer au magasin, précise-t-il. Je confesse que je n’ai pas le moindre souvenir de cela.

Enfin, il rappelle que Fernand Bolle – qui avait deux filles et avait fonctionné précédemment rue de la Fosse Roulette – avait tenu une alimentation générale Courthéoux où est l’actuel restaurant L’Eau de Mélisse.

RN

mardi 17 avril 2012

La croix de Burtonville




La croix de Burtonville.

La photo fut prise le 23 septembre 2000. La croix avait été dérobée en 2004.
Et la voici, et tant mieux, qui réapparaît assez mystérieusement d'ailleurs......

mardi 10 avril 2012

LA HAUTE ARDENNE ET LES DEBUTS DU SPORT AUTOMOBILE

Vers la deuxième moitié du XIXe siècle, de nombreux chercheurs se mirent à la tâche, en France, en Allemagne, en Italie, en Grande-Bretagne et même aux Etats-Unis, empruntant leurs solutions aux voitures à chevaux, aux machines à vapeur, aux locomotives et aux bateaux, pour mettre au point ce qui allait devenir une "automobile".
De 1890 à 1900, les constructeurs se multiplient et commencent à compter une certaine clientèle : l'industrie automobile fait ses débuts. Mais ces pionniers furent confrontés ab initio à l'important problème d'avoir à prouver que les voitures qu'ils construisaient, propulsées par des moyens mécaniques et non plus tirées par des chevaux, constituaient une solution de remplacement valable. Ils s'attachèrent à démontrer que ces automobiles pouvaient couvrir certaines distances à des vitesses bien supérieures à celles que les charrettes ou chariots attelés étaient capable d'atteindre et, pour ce faire, organisèrent des compétitions. La course automobile est donc aussi vieille que l'automobile elle-même.
Les premières courses d'automobiles organisées dès 1884 se déroulèrent de ville à ville : Paris - Rouen, Paris - Bordeaux, Paris – Vienne, et bien d'autres. Les accidents causés par le passage de ces épreuves dans les localités populeuses, l'augmentation des vitesses atteintes et la recherche du nouveau firent naître l'idée de courir en circuit fermé. Elle prit forme en Belgique, avec le Circuit des Ardennes et la formule ne tarda pas à être universellement adoptée.

En 1902 donc, il y bien plus de cent ans, était organisée la première compétition "en circuit". C'est sur le Luxembourg belge, région accidentée, peu peuplée et dont les routes offrent de longues lignes droites que s'est porté le choix de l'Automobile club de Belgique. Son président, le baron Pierre de Crawhez (1874-1925) fut pour beaucoup dans la décision. Organisateur, participant…et vainqueur du Circuit des Ardennes, il a son mémorial à Bastogne.

Les tracés.
Il n'y eut pas qu'un seul tracé, mais bien deux, au départ et à l'arrivée de Bastogne.
Circuit utilisé en 1902 et 1903, puis en 1906 et 1907 : Bastogne, Longlier, Offaing, Léglise, Habay-la-Neuve, Corne du Bois des Pendus, Martelange, Bastogne, Malmaison, Bastogne, soit plus ou moins 85 km.
Circuit utilisé en 1904 et 1905 : Bastogne, Ortheuville, Baconfoy, Champlon, St-Hubert, Recogne, Neuchâteau, Hamipré, Léglise, Habay-la –Neuve, Corne du Bois des Pendus, Martelange, Malmaison, Bastogne soit 120 km.

Le règlement.
Le règlement technique de l'épreuve, comme celui des autres compétitions organisées en Europe à cette époque était assez complexe et variait régulièrement. Il était essentiellement basé sur le poids de l'engin et, par conséquent, sur la cylindrée, un gros moteur pesant évidemment plus qu'un petit. En 1906, les voitures étaient classées en deux catégories, l'une de 650 à 1000 kg, l'autre de 400 à 650 kg, les deux places étant occupées, mais le véhicule ne devait comprendre à ce moment ni eau ni essence ni pièces de rechange, ni accumulation d'allumage.
La séance de pesage avait lieu à la gare du Sud à Bastogne et suscitait déjà un grand mouvement de curiosité. Il faut encore signaler qu'à l'origine, l'épreuve était organisée pour des amateurs mais, dès la première édition, les "professionnels" firent le spectacle et glanèrent les lauriers.
Le règlement de la course elle-même était, par contre simple : les concurrents s'élançaient de minute en minute et accomplissaient le plus rapidement possible le nombre de tour imposé. Il n'y avait pas de points de contrôle, ni de secteurs neutralisés, ni de passages à niveau. Le conducteur, une fois le départ donné, dès l'aube pour les premiers, n'est astreint à aucun arrêt en cours de route. Il peut choisir ses points de ravitaillement. Il n'y avait donc pas de départ groupé mais bien un "contre la montre".
Une particularité de la réglementation de la première édition du Circuit était que toutes les places des véhicules classés dans la catégorie "tourisme" devaient être occupées par un passager. Pour les autres éditions, comme pour la plupart des courses automobiles d'alors, le "chauffeur" était toujours accompagné d’un mécanicien. Le fait que des voitures de puissance différente s'élançaient les unes derrière les autres et donc étaient amenées à se rattraper et à se dépasser, conjugué à la poussière soulevée par le passage de ces engins lancés à toute allure, engendrait des difficultés et même parfois des accidents. On tenta dès 1905 d'aménager les routes par un traitement au goudron : cet arrosage dit "goudrogénitage" supprimait, pour un temps, toute poussière.

Les six éditions et leur palmarès.
- Le 31 juillet 1902 : 75 inscrits, 6 partants, 33 à l'arrivée; 6 tours de circuit, distance 514 km; 4 catégories : course, voitures légères, voiturettes, tourisme. Vainqueur : Charles Jarrott (GB) sur Panhard 13,6 litres en 5 h 53'38" à la moyenne de 86,9 km/h.
- Les 22 et 23 juin 1903, deux épreuves annexes se déroulent le premier jour : une course au km et une course de côte; deux catégories : voitures et voitures légères; 6 tours et 514 km à parcourir. Les voiturettes et motocycles concourent le lendemain sur un circuit de 136 km à faire deux fois : Arlon, Bastogne, Champlon, St-Hubert, Recogne, Semel, Longlier, Léglise, Habay-la-Neuve, Etalle, Arlon. Vainqueur sur 44 partants : Pierre de Crawhez sur Panhard 70cv en 5h 52'08" à la moyenne de 87,6 km/h.
- Les 24 et 25 juillet 1904 : même chose que l'année précédente pour les voiturettes et motocycles; l'épreuve se dispute sur un circuit allongé à parcourir cinq fois (600 km); catégories : voitures et voitures légères; le record du tour est établi à 107 km/h par Le Blon sur Hotchkiss. Vainqueur sur 34 partants : Georges Heath sur Panhard 90 cv à la moyenne de 92,2 km/h.
- Les 5, 6 et 7 août 1905 : également deux journées : circuit pour les voiturettes et motocycles : Arlon, Corne du Bois des Pendus, Habay-la-Neuve, Stockem, Arlon; le grand circuit (5 tours, 600 km) a fait l'objet d'un "goudrogénitage". Vainqueur sur 14 partants :Victor Hémery (F) sur Darracq 80 CV en 5h 58'32" à la moyenne de 100;5 km/h.
- Le 13 août 1906, on revient au premier tracé qu'il faut effectuer 7 fois (600 km). 28 inscrits mais 19 partants seulement. L'américain Arthur Duray gagne sur une de Dietrich à 106;5 km/h de moyenne.
- Les 25 et 26 juillet 1907, introduction d'un nouveau règlement avec deux épreuves sur le grand circuit : l'une pour les voitures de cylindrée réduite à deux litres et d'un poids maximum de 1175 kg; 23 partants, participation des pneus Englebert qui équipaient la voiture du vainqueur, Brabazon sur Minerva à 96,24 km/h; l'autre pour les engins de formule libre disputant d'autres épreuves à l'étranger; 6 participants; 7 tours soit 600 km; vainqueur : Pierre de Caters (b) sur Mercédes à 92,55 km/h.

Les vitesses atteintes ne manquent pas d'étonner. Nous sommes, rappelons-le, au début du XXe siècle et l'automobile, si elle n'en est plus à ses balbutiements, n'en a pas pour autant dépassé le stade de la prime jeunesse. De plus, les routes ne sont toujours que des chemins empierrés, même si les grenailles sont, à partir de 1905, enduites de goudron. Mais les voitures, très lourdes (une tonne et plus) étaient également très puissante (12, 14 et même 18 litres de cylindrée et développant 100 CV et plus) et bénéficiaient déjà de certains perfectionnements comme l'arbre à cames en tête et les jantes démontables.
Il n'empêche que ces performances sont véritablement extraordinaires pour une époque où la presque totalité de la population se déplace encore à pied, à cheval ou en voiture…hippomobile au rythme maximum de 10 km/h, ou le parc automobile est encore, surtout dans la province du Luxembourg, réduit à quelques dizaines de véhicules réservés à une catégorie de gens aisés.

Importance sociale.
Pour donner une idée de l'importance de cette course de voitures pour une grande partie de la province du Luxembourg, nous donnerons la parole à deux auteurs d'études sur la région de Bastogne.

Pour le chanoine P.Fécherolle, dans sa Contribution à l'histoire de Bastogne – Bastogne dans le temps, la physionomie de Bastogne a subi une modification assez brusque au début du XXe siècle : beaucoup plus tôt que les petites villes luxembourgeoises de même importance, la localité s'est "urbanisée", a pris les attitudes de la grande ville. La cause en est le Circuit des Ardennes (…). Cet événement qui se passait au début des vacances attirait un certain nombre d'étrangers qui séjournaient pendant quelques jours, voire quelques semaines (…). L'entraînement durait plusieurs jours et la localité connaissait une fièvre et une activité que jamais elle n'a retrouvées (…). Il paraît que de deux civilisations en contact, c'est la plus avancée qui absorbe l'autre (…). On a copié le "genre" et les toilettes du beau monde qui remplissait les hôtels et logeait un
peu partout (…). Les gens de Bastogne se sont mis à copier les élégances qu'ils avaient sous les yeux et ce fut la fin de ce qu' il pouvait y avoir de "paysan" dans les allures de la petite ville (…).

Quant à A.-J. Guillaume, il consacre dans son ouvrage polycopié Bastogne et l'histoire quelques pages, remplies d'imprécisions mais aussi de détails pittoresques, au Circuit des Ardennes.
"Chaque année, à l'époque de cette épreuve, Bastogne, la paisible et tranquille cité ardennaise, qui n'avait guère connu jusque là que le brouhaha des foires et les chariots amenant à la gare les récoltes des campagnards voisins, voit affluer les foules, les grandes foules cosmopolites qui sont aux aguets des plaisirs inédits (…). Le Comité des fêtes fait de louables efforts pour procurer aux étrangers, à des prix raisonnables, gîtes, nourriture et garages. Mais les bons ardennais, profitant de cette aubaine exceptionnelle, ne se font point scrupule de rançonner les touristes. Des cas nombreux et typiques d'exploitation sont restés légendaires. Un vulgaire seau d'eau se paie 1 franc; 1 franc aussi une bouteille de bière. On dut donner 10 francs pour un lit et 20 francs pour garer une auto dans un coin de remise. Mais tel était l'attrait de ces courses que les étrangers passaient allègrement par les exigences les plus exorbitantes. Un fleuve d'or coulait dans la petite cité, nommé " Paris en Ardenne", pendant ces jours d'amusement, de fièvre et les Bastognais y puisent sans vergogne (…).
Le jour du départ, "la foule est dense derrière les barrages. La route de Marche est occupée par des autos; des autos encore sous la surveillance des chauffeurs couvrent toute l'étendue du "Carré". Et sans cesse des machines arrivent de tous les points, amenant de nouveaux spectateurs. Il faut jouer des coudes pour se frayer un passage et parvenir jusqu'aux fils de fer, car tous veulent dévisager les "Coureur" qui se préparent à partir (…). Et, de minute en minute, les différents coureurs s'élancent au milieu des acclamations enthousiastes des spectateurs, acclamations qui se répètent dans les villages de la traversée, sur tout le parcours de ce gigantesque triangle de plus de quatre-vingt-cinq kilomètres que comporte le circuit et les concurrents devront effectuer sept fois (…).
"Des villageois en sarrau coudoient des snobs en costume excentrique, courtes culottes, bas quadrillés, caquette plate; à côté des linons et des mousselines, la robe noire des ecclésiastiques fait tache.
"Et tous ces éléments hétéroclites se bousculent sans hostilité, camaradant presque comme un jour de fête nationale (…). De jeunes paysans tiennent en main la liste des engagés sur laquelle ils s'apprêtent à inscrire les arrivées successives; ils tendent l'oreille pour écouter les pronostics émis par les étrangers parlant français. De vieux fermiers fumant la pipe font remarquer la couche de boue qui souille les trèfles bordant la route, certains champs de pommes de terre qu'on n'avait pas suffisamment respectés.
" A côté des ces gens calmes, des citadins font des paris, des éphèbes, à la figure blême, aux cheveux cosmétiqués, engagent des conversations galantes avec des jeunes personnes outrageusement fardée (…).
" L'intérêt grandit à mesure que les machines apparaissent. On suppute avec passion les chances de tel ou tel coureur."

Cet enthousiasme se retrouvait à coup sûr dans toutes localités traversées et le long du parcours où se rassemblaient tous les villageois des environs et d'ailleurs. Il s'agissait vraiment d'un événement extraordinaire dont la réputation s'étendait à l'Europe entière et même au-delà, puisque participaient des pilotes que l'on retrouvait lors de toutes les grandes compétitions, des automobiles représentant tous les grands et petits constructeurs d'alors, des marques de pneumatiques comme Englebert, qui allaient, elles aussi faire leur chemin par la suite.
On venait de loin pour assister à cet événement, ou tout au moins dans l'espoir de voir un passage, et l'excursion était dignement fêtée. Témoin, cette carte postale envoyée de Bastogne en 1904 et disant : 'Je suis au Circuit des Ardennes. Il y a beaucoup de monde. Il est 1 ½ h du matin et on ne s'ennuie guère. Compliment à tout le monde. Bonjour. Alfred." Et cette autre envoyée de Vielsalm à Ostende : 'Lundi 7 août 1905. 9 ½ h du matin. Sommes levés bien tôt pour partir au Circuit des Ardennes. Nous sommes en panne à Vieil-Salm. On répare quelque chose à la machine mais nous espérons bien encore arriver à la Barrière de Champlon. Gros baisers."

L'épreuve sportive s'accompagnait de toute une série de festivités : grands concerts au kiosque de la place du Carré par la Lyre ouvrière ou par la Philarmonique, cirque, foire, baraques de toutes sortes. La Compagnie des wagons-lits organisait même un train spécial à destination de Bastogne.
Bref, le Circuit des Ardenne constitua pour cette région une événement de renommée quasi mondiale, une occasion exceptionnelle de délassement, mais aussi une cause de profonde évolution.

Fin …et suite.
Le Circuit des Ardennes ne sera pas reconduit en 1908 : trop peu de concurrents s'étaient inscrits.
Il faut dire qu'une vingtaine d'épreuves importantes se sont déroulées en 1907. Le virus a gagné le monde entier et chacun veut essayer une nouvelle formule,
imposer un nouveau règlement. Les exigences techniques ne sont jamais les mêmes et les constructeurs ne savent plus où donner de la tête. Certaines épreuves vont prendre de l'importance, d'autres perdre celle qu'elles s'étaient forgée en quelques années. Ce fut, hélas le cas du Circuit des Ardennes.
La Haute Ardenne n'en a pas moins été un très haut lieu du sport automobile à l'époque héroïque.
Une commémoration sur deux jours a été organisée pour le centenaire de l'épreuve : des centaines d'anciennes automobiles se sont élancées sur un parcours adapté. Cette commémoration aura lieu tous les trois ans donc aussi du 30 juin au 3 juillet 2011.

Robert NIZET

samedi 7 avril 2012

Les ceux de chez nous

FANS DES CELTES





Marc Nottet né en 1975 est bien connu au-delà de Salmchâteau pour avoir créé dernièrement un commerce de produits de bouche et d’artisanat d’art mais aussi parce qu’il est un membre actif de la Concordia et qu’il est organiste à l’église Saint-Servais. Avec sa sœur Maria, enseignante, ils ont été élevés dans une famille qui les a toujours éveillés à l’histoire et aux traditions locales : participation aux sociétés locales, intérêt pour l’histoire du village, promenades, bref dans un environnement favorable à développer l’amour de sa région natale.

Le renouveau vers 1990 de la culture celtique notamment via la remise au goût du jour de la musique bretonne et irlandaise les a séduits et ils sont devenus experts en la matière en s’intéressant donc au patrimoine local (camp celte, tertres d’orpaillage,…) puis en étendant leur intérêt à des régions voisines ( Wéris) ou plus lointaines lors de vacances en Ecosse et en Bretagne. Ils y ont rencontré une culture celtique très vivante illustrée notamment au Musée des Celtes de Libramont avec lequel ils sont en contacts fréquents. Les rencontres avec Raphaêl Zander de Bellevaux, auteur du livre Le Chant du Roitelet, furent aussi très enrichissantes.

Ils se sont donc rendu compte que, contrairement à ce qu’on leur avait appris à l’école, on n’est pas ici que dans une culture judéo-chrétienne, que l’humanité n’a pas commencé avec les Romains et que certaines coutumes et fêtes ont été adaptées à partir des fêtes et croyances celtes. Maria et Marc ont donc voulu partager dans la région une richesse à la fois archéologique et immatérielle encore cachée ou méconnue en créant un événement festif (dès 2009, premier festival celtique) via d’abord une ASBL existante ( Groupe d’Enfants de Salmchâteau) et en proposant des activités pédagogiques et ludiques aux enfants mais aussi aux adultes. Une ASBL spécifique pour le festival ( Beltaine SCA) sera ensuite créée qui propose une panoplie d’activités variées pour tout public : groupes musicaux, marché artisanal, animations pour enfants, promenades guidées,… Cette année, l’accent sera mis sur la déesse d’Ardenne Arduina. Marc Nottet donne l’aperçu suivant du calendrier celtique articulé autour de quatre fêtes. En fait, il est intarissable sur le sujet et sa passion transparaît dans ses propos.

SAMAIN est le nouvel an celtique qui marque le début de la période obscure de l’année. Il est mieux connu sous le nom d’Halloween transporté aux Etats-Unis par les émigrants irlandais et revenu chez nous sous forme commerciale. Il a donné la Toussaint et la fête des morts dans le christianisme.
IMBOLC est la fête de purification au sortir de l’hiver : on allume les chandelles, on purifie les étables. C’est la chandeleur mais aussi la fête de la déesse Brigitte.
BELTAINE marque le début de la période claire de l’année et l’avènement du dieu solaire celte Belenos. On allume deux feux sacrés entre lesquels passent gens et bêtes pour assurer une bonne récolte. C’est aussi une fête sacerdotale : les druides sont intronisés. On parle aussi à ce moment de l’organisation politique de la société celte.
LUGNASAD au début août est dédiée au dieu Lug. La lumière est alors importante mais il s’agit plutôt de lumière spirituelle.

Pour l’organisation des festivités, ils sont en rapport étroit avec le Musée des Celtes en vue d’aborder les thèmes avec le plus d’exactitude possible. Ils veulent combattre les clichés dispensés par des anciens manuels et par les histoires d’Astérix et Obélix notamment : ceux-ci sont basés sur des écrits romains et les celtes y sont présentés comme des brutes sanguinaires appartenant à une civilisation mineure. Ce n’est pas du tout le cas : la culture celte était très raffinée et capable de prouesses artistiques mais était desservie par l’absence d’écriture.

Marc précise encore qu’il n’est pas du tout question de rejeter la religion judéo-chrétienne mais que c’est une chance d’avoir une culture si riche. Tenter de redécouvrir ses racines, ce n’est pas pour autant rejeter tout le reste, c’est surtout redécouvrir qui l’on est et où l’on va. Il est aussi important de respecter ce qui se fait maintenant. Ceux qui veulent en savoir plus sur ce sujet peuvent consulter le site de l’ASBL : www.beltainefca.be

Robert NIZET

mercredi 4 avril 2012

Tarif des ardoises de Vielsalm sous l'Ancien-Régime









J. M. WOUTERS, Livre des placcarts, édits, règlemens, et décrets émanés depuis l’an M.DCLXX (1670), Bruxelles, 1737.