lundi 14 septembre 2009

Histoire vraie d’autrefois. Ils marchaient…

(publié le 6 janvier 1963)

Être facteur des postes, à Vielsalm, au début de ce siècle et avant 1914, ne constituait certes pas une sinécure.

Aujourd’hui, presque tous les postiers jouissent de vélos ou de véhicules motorisés ; ou même une bonne partie de leur courrier est portée « en avant ». en ce temps-là, ils ne disposaient que de leurs jambes ; et ce n’était pas sans raison que tout bon marcheur était sensé utiliser « l’huile de pied de facteur ».

Disons aussi que le service des postes à temps plein requérait des prestations journalières de dix heures, et que, le dimanche aussi, même avec une tournée réduite, il fallait « marcher ».

Au bureau de Vielsalm, le facteur désigné se rendait à Sart-Sainte-Walburge l’avant-midi, à pied s’entend, et devait encore effectuer une seconde tournée après quatre heures dans une autre direction, mais plus courte, heureusement. Au bout de la journée, cela lui mettait dans les jambes au moins une trentaine de kilomètres.

Une seconde tournée avait lieu à Sart, pour laquelle un autre facteur « montait » au tram, mais revenait à pied, faisant donc dix kilomètres au retour. Peut-être n’avait-il porté qu’un journal et une carte affranchie à cinq centimes ; mais il fallait « marcher ».

Pendant quelques temps, le facteur Léopold WERGIFOSSE effectua trois distributions pour remplir sa journée : à Salmchâteau, dès le matin ; puis il gagnait Ville-du-Bois ; et l’après-midi il se déplaçait à Rencheux.

Joseph AUBINET, de Vielsalm, lui, pendant plusieurs années se rendit à Goronne et Arbrefontaine l’avant-midi ; l’après quatre heures, il assurait une seconde distribution à Petit-Thier. Entretemps, il trouvait encore la possibilité de défricher quelque pièce de terre pour soncompte personnel.

Pour ce qui est de Petit-Thier, en semaine, une première distribution avait peut-être exigé d’aller jusqu’à Mont-le-Soie ou Poteau. Le service du dimanche présentait des modifications ; le brave facteur se trouvait déjà à destination à 7 h. du matin ; il pouvait ainsi assister à la messe basse en cette localité, et ; plus d’une fois, quelque paroissien de l’endroit ne pouvait s’empêcher, au cours de l’office, de lire son feuilleton au journal que le postier venait de lui remettre.

À noter que cette distribution très matinale du courrier exigeait au bureau, pour le tri préalable des correspondances, une présence dès 5 h. du matin.



Le règlement ne prévoyait pas que les intempéries ou l’obscurité pussent arrêter le service. Aussi, arrivait-il, qu’aux grands hivers, quand le chasse-neige ne pouvait se rendre partout, le facteur s’écartait de sa route sans s’en apercevoir. Il s’en allait à travers champs, ceux-ci ne comportant pas encore, comme aujourd’hui, de clôtures de barbelés.
On pouvait voir aussi, en ces mauvais jours, Léopold EVRARD se rendre à Petit-Thier en tirant un petit traineau chargé de son courrier.

Quant aux courtes journées, elles imposaient bien des heures de marche dans le noir. Muni de sa forte canne, le facteur était courageux ; il connaissait tous les cailloux de son chemin, et, au besoin, savait se guider selon de lointaines lumières filtrant des volets aux maisons.

Des postiers de cette époque, nous avons souvenance des suivants :
Émile HOFFMAN et Léopold WERGIFOSSE, de Rencheux ; Joseph AUBINET, Joseph BODSON et Constant SONET, de Vielsalm ; Romain EVRARD et son frère Léopold, originaires de Ville-du-Bois.

Malgré les duretés du métier, leur bonne humeur et leur serviabilité frappaient ; elles leur attiraient partout le bon accueil, qu’on leur témoignait, certes, lorsque l’on entendait à la porte du logis : « C’est l’facteur ! »

N.B. Avant de se trouver à l’endroit actuel, c’est-à-dire depuis les environs de 1900 (maison bâtie par Richard DELSINNE, de Vielsalm), le bureau des postes occupait la maison de Mlles GILLET-FOURGON, rue du Vieux Marché.




Gaston REMACLE

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