mardi 15 septembre 2009

Sur les traces d’un village disparu.

(publié dans L’Annonce de Vielsalm, le 20 juillet 1952)

M. Gaston REMACLE, ce fin mais trop modeste historien du Comté de Salm, que nous remercions en commençant, attira un jour notre attention sur un fait géographique et historique particulièrement rare chez nous : la disparition d’un village.

Cet événement s’est passé sur le sol de notre commune sans doute vers le XVIIIe siècle. Il s’agit donc de l’ancien village de Gottale situé à l’emplacement du lieu-dit du même nom sur le chemin de Quatre-Vents à Bêche.

M. Gaston REMACLE avait eu l’amabilité de nous écrire, dans une lettre qu’il nous adressait le 4 décembre 1949, qu’en 1604 habitait en cet endroit « Henry le Chastelain de la Gottale ». le village était encore habité en 1700 et a compté sans doute 3 ou 4 maisons. On ne connaît pas, jusqu’à présent, la date du départ du dernier « Gottalois ».

C’est pour étayer ces renseignements que, l’automne dernier, nous nous sommes rendus à la Gottale en compagnie d’un vieux Neuvillois — M. Joseph DENIS — qui connaît bien les recoins de la forêt parce qu’il les a parcourus en tous sens depuis sa prime jeunesse.
En suivant le chemin (fléché) de Quatre-Vents à Bêche, au milieu d’immenses épicéas, dans le silence et l’odeur de résine, nous avons atteint l’un des endroits où se serait élevé le village de Gottale. C’est actuellement une prairie occupée par la famille COMTÉ et joignant des parcelles appartenant à M. le Baron de Rosée, M. PAYON et Mlles PAQUAY. Notre guide se souvient très bien avoir vu, il y a 30 ans, de vieux murs branlants qui ont été démolis et c’est ce qui expliquerait la présence des pierres placées en guise de « clôture » à la propriété.

D’autre part, un petit chemin, complètement désaffecté, dont on aperçoit encore les ornières, semble être celui qui mettait les demeures en communication avec la « voie » de Quatre-Vents à Bêche. Enfin, ajoutons que le site a considérablement changé depuis 60 ans mais qu’il n’a rien perdu de son attrait. Aux prairies et champs cultivés qui occupaient alors le plateau, ont succédé d’immenses forêts qui s’étendent loin devant nous.

Mais ce n’est pas tout, nous semble-t-il, le seul emplacement occupé par les constructions du petit hameau disparu.
Plus loin, au moment où le chemin déjà cité débouche dans la campagne du paisible village de Bêche, vers le bois, au-dessus d’une prairie apparaît un morceau de terrain, qui incontestablement, fut occupé par une maison assez importante. Une végétation, composée de plants grandissant dans les ruines, y pousse en toute quiétude.

Et nous ne sommes pas loin de penser que là a dû s’élever l’antique manoir occupé, à partir de 1604, par Henry le Chastelain de la Gottale.
L’endroit est bien choisi et permet de découvrir un paysage splendide. Notre guide, dont le témoignage est confirmé par sa sœur, Mme BLANJEAN, de Quatre-Vents, que là aussi, vers 1890 encore, des murs en ruines étaient apparents et un puits de 4 m. y donnait encore une excellente eau potable.

Dans ces conditions, il ne faut nullement s’étonner que Gotalle ait failli renaître. Mais, comme le fait très justement remarquer Gaston REMACLE, ce fait n’a rien à voir avec l’ancien village de Gottale.

Nous voulons cependant mettre sous les yeux de nos lecteurs ce que nous savons de cette renaissance. Les Salmiens qui ont atteint la soixantaine ou plus et qui ont hanté ces paysages pourront sans doute confirmer ce qui va suivre.

Ce fut à la fin du XIXe siècle, grâce à la ténacité de la famille STOFFEL, originaire de la Capelle, que Gottale faillit bel et bien renaître de ses ruines… En effet, vers 1881, cette famille acheta à la Gottale du terrain à … 58 centimes la verge où bientôt, une construction modeste s’éleva. Le terrain en question se trouve en bordure du chemin déjà cité à l’orée du bois et on peut encore voir des ruines (dont une cave) de la maison qui malheureusement brûla en 1901.

La renaissance de Gottale ne dura, selon les récits des témoins, pas plus de 20 ans. La famille STOFFEL, de braves gens, appartenait à la paroisse de Neuville (à l’époque vicariat), où elle se rendait, chaque semaine, à la messe dominicale. Par après, elle se dispersa. Seul Henry bâtit une maison à Quatre-Vents, et pas mal de gens évoquent encore sa mémoire avec un fin sourire car il commença sa construction par … le toit.

Ces quelques mots prouvent, n’est-il pas vrai, que le passé du Pays de Salm est riche en épisodes de tous genres.
Le passé nous est trop peu connu et c’est assurément dommage. Touristes, Salmiens, faites après nous la promenade de la Gottale… et vous ne regretterez pas votre après-midi. En terminant, nous ajouterons que le dernier mot au sujet de Gottale n’est pas dit, et nous serons heureux si l’un ou l’autre lecteur voulait bien nous faire parvenir tout renseignement susceptible d’étayer, de redresser ou de compléter cette modeste enquête. Nous les en remercions vivement et exprimons notre gratitude à M. Joseph DENIS qui, malgré son âge, nous a accompagné à la Gottale et nous a fourni en somme la substance de cet article.

Joseph DUSSART

Ndlr :

Il n’y a jamais eu de manoir en cet endroit !

2 commentaires:

  1. Bonjour,
    Pourrais je avoir plus de précision sur l'emplacement de ce "village" disparu, comment retrouver cet endroit.
    Merci.
    M. STRUZIK
    Lavaux-WANNE

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    Réponses
    1. Bonjour Monsieur Struzik,

      " A la moitié de son parcours, le chemin qui va du sommet de Quatre-Vents vers Bèche rencontre l'endroit dénommé Gotale" (G. Remacle, Vielsalm et ses environs, p. 143)
      L'auteur ajoute que l'on décèle les traces d'au moins quatre habitations.
      GB

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