samedi 24 mars 2012

DEUX RÉSISTANTS ET UNE ÉNIGME

La seconde guerre mondiale n'a pas fait à Vielsalm des destructions massives ni d'importants massacres de population. La localité n'a pas pour autant traversé l'épreuve sans pertes matérielles et humaines. Parmi ces dernières, on trouve le nom de deux résistants au destin bien différent. Grâce à son nom donné à une rue, la population actuelle connaît Freddy Wampach ou tout au moins en a entendu parler. Quant à l'autre, Roger Nizette, il est pour tous hors du cercle de la famille, des connaissances et des voisins, un inconnu.

Frédéric dit Freddy Wampach est né à Priesmont – Vielsalm le 15 octobre 1903.Une plaque commémorative a été placée sur la façade de sa maison natale. Après son service militaire au 12e régiment de Ligne, il entre dans le secteur des assurances et se marie. Le couple s'installe à Woluwé-St-Lambert et aura un fils.
En 1940, lors de la mobilisation, il est affecté à la garde territoriale et est chargé de la surveillance des voies de communication. Après la capitulation le 28 mai 1940, il se dirige vers La Panne où, avec huit autres, il parvient à se procurer une embarcation pour se rendre en Angleterre. Recueillis par un destroyer britannique, il retrouve d'autres belges au Pays de galles. En 1941, il intègre les « missions spéciales », c'est-à-dire les commandos. Quatorze mois d'instruction serrée lui valent un brevet de parachutiste-radio et un nom de code : Vermillon.
Parachuté en France le 10 septembre 1941, il entame une périlleuse mission de renseignement à l'insu de l'occupant allemand et du régime de Vichy. Durant plus de six mois, il accomplit sa tâche sans rencontrer d'obstacles majeurs. Mais le vent va tourner : le 17 mars 1942, il est surpris près de Bergerac alors qu'il est en train d'émettre vers Londres. Il semble qu'un de ses compagnons ait commis une imprudence. Emprisonné à Châteauroux, il ne parle pas malgré la torture. Condamné à la détention perpétuelle en juillet 1942, il est conduit à Bergerac puis à Périgueux. Durant des mois il mûrit un projet d'évasion. A peine échappé, les Allemands conscients de son efficacité, donnent l'alerte jusqu'en Belgique. Sa tête est mise à prix et son portrait affiché partout en Belgique et en France. Il arrive dans la région de Ath où un industriel de l'endroit l'héberge et lui permet de se rétablir tout en menant des actions de sabotage ou de vols de documents à l'ennemi. Il va ensuite se cacher du côté de Hannut où il rencontre un soi-disant chef de groupe de la résistance qui se fait fort de le renvoyer en Angleterre par l'entremise d'un faux responsable de réseau d'évasion et vrai collaborateur, agent du contre-espionnage allemand. Le jour du départ, le 10 septembre 1943, Freddy Wampach monte dans une voiture avec cet agent double qui s'arrête en un point convenu avec la Gestapo. Celle-ci n'a qu'à le cueillir. Il est interné à la prison de St-Gilles et le 10 décembre 1943 est fusillé au Tir National à Schaerbeek. Il recevra à titre posthume de nombreuses décorations anglaises et après la guerre, le 24 septembre 1945, son corps sera transféré au cimetière de Vielsalm


Roger Nizette né le 3 mai 1924 habite à Salmchâteau avec sa mère et ses trois sœurs; le père est décédé. En 1942, il entre dans l'Armée secrète, sous-secteur Hoss et au début de 1945, c'est lui le chef du poste Croix-Rouge de Salmchâteau chargé de venir en aide aux civils en cas de bombardements. Nous sommes en plein dans l'offensive dite des Ardennes. Les troupes allemandes ont repris Salmchâteau le 19 décembre et depuis, chaque jour, la famille Nizette reçoit la visite d'un S.S.. C'est évidemment très inquiétant. Le 4 janvier, les Allemands ordonnent à la famille Nizette de quitter leur maison : elle se rend au château de Sainte-Marie, à quelques centaines de mètres, où elle sera hébergée dans une des caves
Le lendemain 5 janvier, deux soldats allemands en armes procèdent à l'arrestation de Roger. Sa sœur aînée, Madeleine, s'inquiétant à juste titre du sort de son frère, les suit à distance et remarque qu'on l'emmène à la ferme voisine chez Viance. Dans cette même ferme avaient été réquisitionnées certaines places pour y loger un gros gibier : on parle du général S.S. Remer. Une heure et demie plus tard, Madeleine qui guettait dans les arbres du château aperçoit un camion bâché qui débouche de la cour de la ferme et elle reconnaît son frère entre les deux sentinelles allemandes. Le camion passe à Salmchâteau où il est aperçu par des gens à qui Roger fait des signes de la main. On apprendra par la suite que le camion s'est ensuite rendu à Rencheux où les Allemands arrêtent et enlèvent Marthe Huberty épouse de Louis Lecomte, en l'absence de celui-ci puis se rend à Burtonville où il s'arrête à la ferme Octave. Roger se verra obligé de scier du bois le restant de la journée, sous haute surveillance bien sûr, puis passera la nuit dans la cave.
A partir de ce moment-là, on n'aura jamais plus de nouvelles des deux prisonniers. Tout ce qui suit est au conditionnel. On aurait vu Roger, le lendemain matin, partir vers le Grand Bois, une pelle sur l'épaule et accompagné d'un Allemand en armes; on aurait aperçu une dernière fois les deux prisonniers à Grufflange,…Roger a-t-il été abattu et enterré dans le bois proche de Burtonville ? A-t-il été emmené et abattu plus loin ? A-t-il été emmené en Allemagne puis capturé par les Russes et transféré dans un de leurs camps comme l'a longtemps espéré la maman ? A ce jour, aucune réponse ne peut être donnée à ces questions et ne le pourra sans doute jamais, à moins d'un sursaut de quelqu'un qui sait et qui veut libérer sa conscience . Mais il devient bien tard.
Le jour avant son arrestation, Roger Nizette avait enterré son arme dans un trou creusé dans la cave de leur maison et brûlé des papiers compromettants dans le même trou. Après l' arrestation, la famille Nizette est évacuée en même temps que d'autres personnes de Salmchâteau par des camions américains vers le village de Cession (Chevron). A son retour, elle trouvera sa maison brûlée volontairement par les boches et en fouillant la cave, l'arme à l'endroit où Roger l'avait enterrée.

Robert NIZET

Sources : diverses coupures de journaux de l'époque et (pour Roger Nizette) des souvenirs écrits par feu Louis Siquet.

4 commentaires:

  1. Merci pour ces deux reportages et merci d'être la mémoire de nos pères.

    Muriel Wampach, petite-fille de Freddy Wampach

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    1. Bonsoir, même commentaire sur ces lignes émouvantes !!
      J'ai dans ma généalogie une certaine Marie Gentille Aurélie WAMPACH, née à Petit Thier le 02 / 05 / 1868 et décédée après 1924, mariée le 18 / 04 / 1895 à Vielsalm avec DENIS Louis Guillaume Marie, né le 03 / 08 / 1864 à Vielsalm.
      Serait elle par hasard de votre famille ? Merci de votre réponse, même négative ! Cordialement, Jackeuro sur Généanet

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  2. Avec le même remerciement et la même gratitude.
    Roger Wampach, fils de Freddy et pére de Muriel.

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  3. Bonjour,
    Je voudrais savoi si Freddy Wampach avait une soeur??? Albertine, si oui c'était la mère de ma grand-mère. Je refais un arbre généalogique. Merci de m'aider. et Jules Wampach serait-il son frère??

    S. HEINEN Viesalm

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