samedi 1 août 2009

Quand le Comte de Salm battait monnaie à Vielsalm.

(publié dans Pays de Salm, le 19 décembre 1954)

Vers 1890, on trouva, aux environs de Houffalize, une ancienne pièce de monnaie, en argent, pesant 2 gr.,20, dont voici la description.
Sur l’une des faces, portant au centre un aigle monocéphale aux ailes éployées, se lisait :
+ Henricus. Comes. De. Sallemi.

Sur l’autre face, en légende extérieure : + Benedictum. Sit. Nomen. DN [Domini] ; et en légende intérieure, sur la même face : + Moneta. Salemis.

En 1921, la pièce en question faisait partie du riche médailler au vicomte Bauduin de JONGHE, de Bruxelles.
Ce savant numismate publia, en 1893, une étude relative à la dite pièce. Il désignait celle-ci comme étant « un demi-gros à l’aigle » frappé par un comte de Salm-en-Ardenne. Il donnait comme date probable de la frappe les environs de 1297.

Des études ultérieures sur le même sujet permettent d’admettre qu’il s’agit effectivement d’une pièce frappée entre 1297 et 1301, par le comte Henri IV.
À ce moment, et ce jusqu’au XVIme siècle, les comtes de Salm résidaient encore dans le pays. Leur château-fort près de Salmchâteau, n’était pas encore construit et ne le sera qu’au cours du XIVme siècle. Mais, en 1297, c’était donc toujours à Vielsalm, à l’emplacement de l’actuelle villa de Madame MOUTON, que, la famille seigneuriale de Salm habitait.

Ainsi, c’est en ce dernier château, à Vielsalm même, que l’atelier monétaire de Henri IV a dû s’établir.

Toutefois, il ne resta en activité que bien peu de temps, car Henri IV de SALM est décédé avant le 3 avril 1301. D’autre part, par un document du 11 janvier 1307, son successeur et oncle, Henri V (1301 – 1340) faisait la déclaration suivante, et s’engageait pour lui et ses successeurs, vis-à-vis de son suzerain, le comte de Luxembourg, à ne pas battre monnaie :

« … Encor est assavoir que pour ceu que nous n’avons auctoritei de faire monoie […] nous avons promis et sommez tenus, pour nous, nos hoirs ou succescurs, contes de Salmes, que jamais à nul jour nous, par nous ne autrui, ne forgerons ne batterons monoie, en queilcunque coing ke ce soit, dedans les fyes que nous avons repris de notre chier signour … »

Cette promesse n’était sans doute pas prise sans raison sérieuse. En effet, il faut dire qu’en 1297, malgré les engagements formels de ses prédécesseurs à l’égard du comte de Luxembourg, Henri IV de SALM, s’était déclaré vassal du comte de Hainaut, Jean d’AVESNES. Acte de forfaiture pour lequel le comte de Luxembourg se devait d’intervenir avec énergie.

L’ouverture d’un atelier monétaire à Salm se place dès lors dans le même souci d’émancipation du comte Henri IV vis-à-vis de son vrai suzerain de Luxembourg.

Par l’acte du 11 janvier 1307, ce dernier obtenait pleine satisfaction. Henri V, successeur de Henri IV, se soumettait sans aucune réticence. Il affirmait solennellement la dépendance féodale complète de Salm à l’égard de Luxembourg, il promettait aide entière à son suzerain contre ses ennemis, il s’engageait à ne jamais forger de monnaie en quelque coin que ce fût de ses fiefs luxembourgeois.

« Nous Henri, cuens de Salmes, faissons savoir à tous ke comme nostre antecessour […] conte de Salmes aiient estei en la foy et en l’ommaige des nobles hommes les contes de Luccembourch dou chasteal et de la chastellerie de Salmes, nous à nostre temps. Pour ceu que par trespassement de temps les choises qui sont faictes ne soiient hors de memoire, avons renovelleit et renovellons l’ommaige desus dit […] nous vollons et ottrions que nous et nostre hoir ou successeur […] conte de Salmes soions tenu de lui, ses hoirs et successeurs […] contes de Luccembourch et leur terre aidier à défendre contre tous à petite force et à grande […] Encor est assavoir que […] nous avons promis et sommez tenus, pour nous, nos hoirs ou successeurs […] contes de Salmes, que jamais à nul jour nous […] ne forgerons ne batterons monoie … »

De tous ces détails, retenons en tout cas celui-ci : à Salm (Vielsalm), vers 1297, un atelier monétaire des seigneurs de l’endroit a exercé son activité.

Gaston REMACLE

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