mercredi 29 juillet 2015

VIELSALM : DE LA PROPRIÉTÉ BIEVER à la RUE DU VIEUX MARCHÉ (3/6)

Et puis il y avait eu ce fait divers dramatique : le 29 décembre 1935, Jules Sépult  avait abattu, au Bois Lemaire, son ami Henri Archambeau âgé de 29 ans.

 L’Organe de Vielsalm  du 5 janvier suivant  se borne à signaler dans sa nécrologie que Monsieur Henri Archambeau est décédé tragiquement le 29 décembre 1935. Aucun développement de ce fait tragique : il ne faut pas déplaire aux Sépult !
Heureusement, L’Annonce de Vielsalm est moins servile et plus diserte car à la même date elle publie un compte rendu sous le titre  A Vielsalm, un affreux crime de la folie  dont voici l’essentiel.

Notre petite ville a été dimanche dernier, le théâtre d’une horrible tragédie qu’il faut, paraît-il, attribuer à la folie. [… ]Dimanche donc vers 9 heures du matin, M.J. Sépult, 28 ans, partait pour la chasse dans les bois situés entre Vielsalm et Grand-Halleux. Monsieur H. Archambeau, son traqueur habituel et son chien l’accompagnaient. Plusieurs personnes qui croisèrent les deux hommes ne remarquèrent rien d’anormal dans leurs allures. Pourtant vers 11h30,  Sépult arrivait à Grand-Halleux chez un ouvrier de ses parents, Mr Dumont, et lui déclarait qu’il venait de tuer Archambeau et son chien. M. Dumont qui connaissait le caractère exalté du jeune homme n’en crut rien d’abord. Sépult demanda par téléphone un taxi pour le conduire à Marche et se fit arrêter en chemin à Arbrefontaine chez M. le Curé, un ami de sa famille. Il lui raconta aussi la tragédie. Le prêtre lui conseilla d’aller se constituer prisonnier, tandis que lui-même se chargerait d’avertir ses malheureux parents.Or, dans l’après-midi, M. Dumont pris d’un doute vint à la gendarmerie de Vielsalm raconter ce que Sépult lui avait dit. La gendarmerie alertée apprit qu’en effet les chasseurs n’étaient pas rentrés, puis un peu plus tard que Sépult était arrêté à Marche. Cependant la nuit tombait et pour essayer de retrouver le malheureux Archambeau, on fit appel aux jeunes gens et une battue dans les bois fut organisée.[….] Ce n’est que vers 6h30 que le pauvre garçon fut retrouvé étendu sans vie à proximité de la roche du Hourt. Il tenait encore à la main le gobelet d’un thermos.Entretemps, le Parquet avait décidé de ramener le criminel sur les lieux et une reconstitution eut lieu dans la soirée. A aucun moment, Sépult ne manifesta le moindre repentir. Il déclara au Parquet que, depuis quelques temps,  Archambeau prenait trop d’emprise chez lui et qu’il fallait que ça finisse. À peine arrivé au bois, il tira sur le jeune homme un coup de fusil mais la charge se perdit dans le carnier que portait Archambeau. Pris de peur, celui-ci voulut fuir mais à 10 mètres deux nouveaux coups l’atteignirent l’un à la tête l’autre dans la région du cœur ; il tomba, Sépult le suivit et comme le pauvre homme réclamait à boire il lui tendit son gobelet rempli d’eau puis il l’acheva à bout portant. Il se mit alors à la recherche de son chien et à quelques trois cents mètres de la victime qui agonisait, il abattit aussi la pauvre bête. […]La nouvelle de ce crime affreux ne fut connue à Vielsalm que vers 6 h du soir. Une émotion indescriptible s’ensuivit.


Henri Archambeau [frère d’Alexis Archambeau qui était le beau-père de Monsieur Léon Ginsburg et le grand-père d’Anne-Marie Dourte, photo prise lors de son service militaire] était un garçon très estimé. Il avait perdu sa jeune femme [Maria Schüttler, de nationalité allemande et gouvernante à Vielsalm qu’il avait épousée le 5 janvier dernier et qui était déjà décédée le 16 mai !] il y a quelques mois à peine et s’était montré très affecté par cette perte. Il habitait avec son père [Gengoux Archambeau, surnommé Djingoux dès sôlyètes parce qu’il était menuisier, pour le distinguer de l’autre Gengoux Archambeau, fabricant de pierres à rasoir, surnommé lui Dingoux dès pîres] dont la douleur atroce fait vraiment peine à voir. Sépult est l’unique fils d’une famille très honorable. Il était connu pour un caractère bouillant et l’on se demande comment il pouvait encore porter des armes. Il y a 3 ans, au cours d’une crise, il avait déjà tiré sur son père.

Ce fait se serait passé légèrement plus haut que l’actuelle carrière du Hourt et non pas, comme le croient certains, à l’endroit où se dresse une croix le long de la route à proximité de la ferme du Bois Lemaire.
L’affaire avait fait d’autant plus grand bruit dans la localité  que Jules Sépult échappera à la Justice en s’exilant en Suisse, parce que, dit-on, sa famille avait des sous. Mais sans doute l’a – t – on fait aussi passer pour fou et donc déclaré irresponsable ?
Marie-Thérèse, à cinquante ans bien sonnés, est restée célibataire et est donc seule pour gérer l’important patrimoine reçu des parents. Elle dispose toutefois d’une procuration établie par son frère devant un notaire de  (illisible) en république libanaise le 18 février 1950. (S’il ne peut évidemment rentrer en Belgique, il semble qu’il voyage  néanmoins).
 Les années sinon les mois de la grande propriété sont comptés.

                                                                                                  Robert NIZET

vendredi 24 juillet 2015

VIELSALM : DE LA PROPRIÉTÉ BIEVER à la RUE DU VIEUX MARCHÉ (2/6)

Imaginons un instant que nous sommes revenus un siècle en arrière.

On entrerait chez Sépult par la grande porte cochère par où passait  tout le charroi propre à l’activité d’un gros négociant. On laisserait la maison des patrons : nous n’y sommes pas admis. On découvrirait dans la cour ce charroi au repos - un char à foin, un tombereau, un chariot-  envahi pour l’instant par les poules occupées à picorer, en caquetant,  la traînée de  maïs que la servante leur a jeté. On se souviendrait que, jadis, des chevaux et des chiens de chasse à courre ont, ici,  été hébergés. Derrière les grandes remises, on pénétrerait dans le beau  potager avec ses nombreux carrés de poireaux, carottes, haricots, choux, oignons. Tout autour fleuriraient pois de senteurs, phlox, et lupins. Après un rang serré de groseilliers à maquereaux et de noirs cassis, on trouverait dans le verger de nombreuses variétés de pommes et des biyoques  de toutes sortes. On sentirait le chèvrefeuille grimpant contre le mur, le lilas aussi, et on entendrait le bourdonnement des abeilles et des gros maltons, le tchif-tchaf du pouillot véloce, la moquerie du merle, le bavardage de la pie et les notes flûtées des mésanges… Sur l’herbe seraient étendus, pour blanchir,  les draps de lits et le linge de maison.



La maison du notaire par Mary Lang, le 22 août 1910, dessin envoyé à Dykes Lang à Glasgow

En regardant du haut du grand mur vers le côté bâti de la rue,  on découvrirait une animation de tous les instants. À l’hôtel Bourgeois, deux servantes, prussiennes  à les entendre s’interpeller,  secouerait l’une les draps de lit par la fenêtre, l’autre laverait le seuil en pierre bleue à grande eau. Chez Ernotte-Colson, le patron et son commis disposeraient devant la porte les articles de quincaillerie, de ménage et d’éclairage pour attirer les clients de passage. Gaston Gillet sorti de son atelier avec le tablier maculé d’encre d’imprimerie nous adresserait un signe de connivence : la composition de L’Organe de dimanche est bien avancée. On entendrait sur les pavés le cheval tirant la charrette aux roues cerclées de fer de la boulangerie Masson et, jusqu’à ce qu’il soit au moins chez Beaupain,  les roudjons de son collier. On verrait le tram à vapeur, détaché  des wagons de voyageurs, dépasser ceux-ci par la double voie pour se replacer en tête du convoi. On sentirait la fumée s’échappant de sa grosse cheminée et on entendrait le sifflet annonçant le départ vers Lierneux. Le machiniste François Wansart nous saluerait d’un geste de la main. On ne serait pas certain de remettre  la dame assise (est-ce Catherine do fôrîr ou  Madame Lenfant ou encore une autre ?) discutant avec Marie Jacob de Ville-du-Bois et Marie-Joséphine  Lemoine de Rencheux.  Et si c’est jour de marché, la rue grouillerait alors d’une multitude de cochons et de gorets maintenus en place tant bien que mal par les paysans. Le brouhaha de la place où sont les bovins nous parviendrait atténué.
On s’assoirait alors sur le vieux banc adossé au mur de chez Lambert.
On regarderait le soleil se coucher derrière Rencheux.
On écouterait l’angélus descendre du vieux clocher.
On serait bien…
***
Mais revenons les pieds sur terre.
Un demi-siècle plus tard, la guerre et sa dernière offensive sont terminées depuis une dizaine d’années : leurs derniers dégâts sont encore visibles.
Les temps ont bien changé, les contingences économiques aussi.
Les parents Sépult sont décédés, lui en 1943 en pleine tourmente, elle en 1948.
Et puis il y avait eu ce fait divers dramatique : le 29 décembre 1935, Jules Sépult  avait abattu, au Bois Lemaire, son ami Henri Archambeau âgé de 29 ans.


Robert NIZET

mardi 14 juillet 2015

VIELSALM : DE LA PROPRIÉTÉ BIEVER à la RUE DU VIEUX MARCHÉ (1/6)

Actuellement, la rue du Vieux Marché (anciennement rue de la Station) est presqu’intégralement bâtie des deux côtés. Il n’en a, évidemment, pas toujours été ainsi et sans remonter à Mathusalem, les plus anciens habitants de la localité se souviennent que le côté gauche quand on vient de la place Paulin MOXHET (anciennement place du marché) était bordé par un long et haut mur en pierre sèche de schiste d’environ 175  mètres de long et qu’un gros et vieil immeuble faisait le coin de la place du marché.
Il peut être intéressant  d’établir la chronologie du démantèlement de cette propriété généralement connue sous le nom de SÉPULT et de l’urbanisation de ce côté de la rue. Son origine remonte en fait à plus de quatre cents ans et la première partie de ce texte est un résumé de l’article de Gaston Remacle publié dans les nos1 et 2 de 1968 du Bulletin de l’Institut archéologique du Luxembourg  sous le titre Anciennes maisons de Vielsalm.
À la fin du 16ème siècle, alors que Vielsalm n’était qu’une agglomération d’une trentaine de maisons autour de l’église, l’endroit portait déjà une demeure occupée par Jean BIEVER († vers 1602), la plus haute personnalité du comté de Salm. À la maison joignait une  belle propriété : l’aisance derrière la construction, jardin, potager et champs. Celle-ci connaîtra au cours des siècles suivants nombre de vicissitudes.
Incendiée en 1636 par les Hollandais, elle restera très longtemps à l’état de ruines rachetées en 1656 par Jean Pierre ( † 1657), petit-fils de Jean Biever, en 1698 par Jean Quirin  Deumer,  arrière -petit-fils du même qui en fera don à ses deux neveux, les frères Gaspar et Jean-Quirin  Remacly. Ceux-ci, vers 1750, reconstruisirent une demeure spacieuse « située desous le marché à Vielsalm avec une cour renfermée, deux écuries de vaches, une bergerie, écurie de chevaux et granges ; … derrière les dites granges un petit jardin à herbe et derrière celuy-ci un jardin potager, derrière celui-ci un verger. »



Divers propriétaires se succéderont ensuite : Henri David de Malmedy ; le notaire Jean-Louis Raphaël ; en 1845, au début du Cadastre dans notre région,  le négociant en pierres à rasoir et bourgmestre de la localité Christophe Lamberty ;  entre 1848 et 1852, Pierre-Joseph Offergeld, négociant en pierres à rasoir ;  le clerc de notaire Charles Botte et, le 10 mai 1878,  Pierre-Joseph Sépult, célibataire et négociant. Celui-ci décède le 17 décembre 1895 et le bâtiment devient, au partage de ses biens, la propriété de Pierre-Narcisse Sépult.
Ajoutons encore qu’en 1853 et durant quelques mois, les écuries et annexes de cette maison abritèrent les débuts chez nous de la chasse à courre emmenée par le comte de Cornélissen.

Jean-Bernard SÉPULT, cultivateur et Marie-Thérèse MASSON
Pierre Narcisse SÉPULT                 ° 28.10.1861 à Vielsalm  †19.02.1943
Mariage le 09.02.1899 à 37 ans et alors qu’il est négociant, avec
Louise ANDRIANNE                     ° 05.04.1874 à Mellier     †11.12.1948
Deux enfants :
Marie-Thérèse                                 ° 30.11.1899   † 02.03.1978 à Fribourg (CH)
                                                                                              Célibataire
Jules Octave François Joseph         ° 14.04.1908    † 18.11.1963 à Berne (CH)
                                                                                              Célibataire


                                                                                         Robert Nizet

jeudi 9 juillet 2015

À propos de l’Hôtel de Belle-Vue

La série d’articles intitulés « Les trois hôtels de Belle-Vue » parue récemment dans ces colonnes a suscité deux témoignages, ceux de Raymond Laloire et de Jean Neisius qui, par hasard, se sont trouvés simultanément dans mon atelier le 6 juillet dernier. Je  les remercie pour ces précisions.
La maman de Raymond, Madame Joseph Laloire, a été cuisinière en chef à l’Hôtel de Belle-Vue, où elle a connu ma propre maman, aide cuisinière occasionnelle. Elle était arrivée vers 1925 chez la Comtesse de Jonghe et au décès de celle-ci avait été engagée à l’Hôtel. Le roi Albert y  aurait assisté à un banquet de  la chasse à courre.  Quelqu’un en sait- il plus sur cet événement ?
D’autre part, en 1938, la route devant l’église était déjà minée en prévision d’une guerre éventuelle. Un milicien des Chasseurs ardennais montait la garde dans une guérite. Lors de l’incendie de l’hôtel, celui-ci était Georges Duchesne, également pompier, mais qui devait tenir son poste et ne put donc prêter main forte à ses collègues.
Jean Neisius précise alors que le soldat allemand qui a fait sauter le clocher de l’église pour reboucher la route éventrée par la mine belge pour empêcher le passage  de l’ennemi est Walter Jonek. Celui-ci avait fait la connaissance de la maman de Jean qui nettoyait les bouteilles à la brasserie Lenoir au Tienne Messe. Resté en Belgique après la guerre, il travaillera dans les mines de charbon de la région liégeoise et reviendra de temps à autre dire bonjour chez Neisius. Lors d’une de ses visites, Jean lui montrera l’ouvrage de Maurice Delaval  Saint-Vith, l’ultime Blitkrieg de Hitler. Il empruntera l’ouvrage et reviendra  peu après expliquer à Jean que cet ouvrage comportait de graves erreurs. Jean le mit en contact avec Monsieur Delaval mais celui-ci ne voulut rien entendre concernant celles-ci.

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vendredi 3 juillet 2015

Trois hôtels « de Belle-Vue » à Vielsalm (5/5)

Léontine Jeunejean, veuve d’Eugène Thonard, ma grand-tante.

Léontine, sœur de Victor Jeunejean, père de ma maman, était donc la tante de celle-ci: je l’ai forcément bien connue. Elle revenait une à deux fois l’an à Vielsalm et séjournait chez nous : c’était notre Tante Titine puis, quand notre plus jeune frère dont elle était la marraine de baptême commença à parler, Ninine. Sa venue était, pour nous enfants, une grande joie, d’autant plus qu’elle nous apportait à chaque fois des cadeaux. Ses jeux de construction en bois nous ont amusés des années durant. Nous étions à chaque fois désolés qu’elle reparte à Bruxelles car disait-elle, elle avait des locataires. Je me demandais bien pourquoi elle ne ramassait pas ses loques à terre avant de venir ! Elle habitait au 19 de la rue de l’Industrie, une rue donnant dans la rue Belliard. Empruntant cette rue lorsque, bien plus tard, j’allais à Bruxelles en voiture, j’apercevais à chaque fois son ancienne maison avec balcon, jusqu’à ce qu’un jour je constate qu’elle avait été remplacée par un immeuble moderne. Nous allions aussi, mes sœur et frère, en vacances chez elle durant l’été. Ainsi en 1958, j’y suis allé une douzaine de jours et quotidiennement nous nous rendions au Heysel sur le site de l’Expo 58. La plupart des musées de Bruxelles ont aussi reçu notre visite, année après année. Si j’ai souvent écouté les conversations qu’elle avait avec mes parents et retenu de précieuses indications, il n’en reste pas moins que si j’avais été plus curieux, plus ouvert, j’aurais pu lui poser de nombreuses questions et connaître beaucoup de choses de plus du passé de la localité. Elle est morte dans un certain dénuement et seule maman et son cousin Loulou Jacques allaient encore la voir, dans la mesure de leurs possibilités. Outre son veuvage prématuré, il y avait un autre drame dans sa vie. Son mari avait été enterré dans la tombe Moxhet, au-dessus de la morgue, j’ignore pourquoi. En fait un lien familial existait du fait que le père de Paulin Moxhet, Auguste, avait épousé Louise Henrard. Eugène Thonard était donc le cousin de Paulin Moxhet. Cette famille nourrissait à l’ égard de Léontine une haine tenace. Elle n’eut jamais accès à la tombe de son mari et les fleurs qu’elle y déposait étaient systématiquement enlevées. A son décès, son corps ne put rejoindre celui d’Eugène et trouva refuge dans la tombe Jacques, sous la morgue. Une de ses soeurs, Emilie, avait en effet épousé Gustave Jacques, le fabricant de pierres à aiguiser de Salmchâteau. Elle était en excellents termes avec les Jacques. Je suis allé rendre visite avec elle à Gustave et j’ai des souvenirs, certes assez vagues, de la propriété de Salmchâteau au début des années’50.

Sur l’emplacement de l’hôtel : un parking. 

Le croquis cadastral n°25 de 1956 montre que l’ancienne église est remplacée par la nouvelle et les ruines de l’hôtel supprimées. Je n’ai trouvé aucune mention de l’aménagement de ce parking.





*** 

Plus rien ne permet d’imaginer qu’il y eut, là, sept décennies durant, un établissement prospère et dont la renommée dépassait de loin les limites de la commune. Des réceptions prestigieuses, comme celles de la chasse à courre, y eurent lieu, des banquets de mariage et de sociétés. Y séjourna un nombre incalculable de gens se déplaçant à pied, à cheval, en vélo ou en voiture, des touristes pour des vacances ou de passage lors d’une excursion : à deux pas se trouvait la halte de Sous-Bois vers l’Allemagne, à deux cents mètres celle de Rencheux vers Liège ou le Grand-Duché, à cent mètres le départ du tram vers Lierneux, sur le pas de la porte l’arrêt des malles-poste venant de Stavelot ou allant vers Lierneux… Vinrent s’y restaurer ou y prendre un verre toutes sortes de gens de passage, des acheteurs de pierres à aiguiser ou d’ardoises de toiture, les marchands de bestiaux et les fermiers les jours de marché sur la place, les constructeurs de la ligne Vielsalm-Born et les casques à pointe durant la première guerre, les Anglais venus nous libérer, les invités des gens de la chasse à courre, les colporteurs et transporteurs, les médecins, les notaires et tout le petit peuple de nos contrées… Régissant un personnel qui devait être important et accueillant tout ce monde, Tante Titine, après un beau mariage qui ne dura que quatre années suivies d’un très long veuvage…

3) L’Hôtel de Belle-Vue Archambeau


Depuis 1937, il existe de l’autre côté de la route, en face de l’église et donc un peu plus haut que l’hôtel Thonard, un autre hôtel appartenant, lui, à cette époque, à Alexis et Maria Archambeau. Il portait l’appellation Salm-Hôtel. Or, à l’autre entrée de la localité, au quartier de la gare, se trouvait l’hôtel Delvaux appelé Hôtel de la Salm. Il semble qu’il y avait confusion entre les deux et donc les Archambeau ont décidé de débaptiser le leur et de récupérer l’appellation Belle-Vue (sans le « de », en façade tout au moins car il était présent sur les actions de la société) en 1959. Il a fonctionné à la satisfaction générale jusqu’en 2006 et fut longtemps le seul restaurant de la localité mentionné dans le Guide Michelin rouge. Il n’y avait donc aucun rapport entre les deux immeubles pas plus qu’entre les propriétaires respectifs. Cet immeuble existe toujours, inchangé, mais est sorti de la famille. Il est devenu la Villa Belle-Vue, maison de vacances privée.

 Robert NIZET 
(Un fascicule reprenant ce texte augmenté de divers documents photographiques est disponible)